Voici l'email que j'ai envoyé au Canard enchaîné début novembre 2024. Évidemment, aucune réponse au-delà de l'accusé de réception du secrétariat. Les liens ne figurent pas dans mon email.
Bonjour le Canard,
Je souhaite évoquer l'absence de fiabilité et/ou de complétude, et/ou de mise en perspective et/ou de qualité d'un nombre conséquent d'articles du Canard. Je ne vais pas tous les énumérer, uniquement ceux qui m'ont le plus marqué :
Articles Ciotti dépouille LR (09/10/24) et Le fichier dont ils se fichent (16/10/24) : ne contiennent pas le niveau d'info nécessaire pour que la société civile ou l'autorité de contrôle (la CNIL) puisse s'emparer du sujet. Voir mon email du 16/10/24 ;
Article Elon Musk sourd aux demandes des grandes oreilles du 02/10/24 :
- « […] matériel espion pour siphonner leurs données » : de quoi parlez-vous ? Interceptions administratives ou judiciaires ? Données de connexion ou trafic ? En temps réel ou non ? ;
- Au début de l'article, Starlink demanderait une indemnisation trop salée, donc Starlink échapperait aux services FR. À la fin de l'article, la France a obtenu un tunnel virtuel. Quelle cohérence ? L'indemnisation n'est-elle pas régie par arrêté (du 12 janvier 2018 fixant la tarification applicable aux demandes ayant pour objet la mise en œuvre des techniques de renseignement) ? ;
- La méga-antenne allemande est très probablement un Point of Presence (PoP), c'est-à-dire des équipements réseaux actifs (routeur, authentification, agrégation, supervision, etc.) dans un centre de données. Pourquoi ne pas le présenter ainsi plutôt qu'une vulgarisation gloubi-boulga ? Même un PoP ne permettrait pas d'intercepter le trafic IP de l'ensemble de la constellation, uniquement celui des stations terrestres "proches" ;
- Sur l'installation de stations terrestres, il aurait été de bon aloi de rappeler l'opposition des riverains pour des raisons infondées scientifiquement (voir, par ex. Fakir numéro 103). Ces antennes n'échangent pas avec celles des abonnés, mais avec les satellites ;
- En quoi les services FR étaient-ils dans le noir ? Quid des dispositions de la loi renseignement 2 (loi 2021-998) portant sur la surveillance des communications satellitaires ? Quid des demandes d'entraides judiciaires avec l'Allemagne (comme quand un Français utilise un VPN étranger ou un fournisseur d'emails étranger pour commettre des infractions en France) ?
Arnault fait la promo de la presse indépendante ! du 25/09/24 :
- Rien de neuf, du dénigrement récurrent, et du journalisme d'opinion sans intérêt (j'ai également des opinions, je veux des faits). Tant d'autres sujets pourraient être traités (les droits des citoyens, des analyses des projets de lois, des décryptages des évolutions technologiques, de la pédagogie sur les mêmes sujets, etc.) ;
- Vous avez ajouté la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus dans le calcul au barème mais pas dans le calcul PFU (le taux n'est alors pas de 12,8 % mais de 16,8 %) ;
- Vous oubliez de préciser les 17,2 % de CGS & co ;
- L'imposition des holdings n'est pas claire : quel impôt (IS, IRPP sur chaque membre de la famille Arnault, autre) ?
L'extravagant M. Niel se donne en spectacle du 18/09/24 :
- Rien de neuf, du dénigrement récurrent, de l'opinion sans intérêt (j'en ai aussi)… Quand on me tient la jambe sur une page entière (à l'exception d'un article), j'attends qu'on me nourrisse intellectuellement ;
- L'article traite beaucoup de l'immobilier détenu par Niel mais pas de ce qu'il en fait (spéculation ou location ? à quel type de locataires ? pour quels usages ? etc.), ça, ça aurait été de l'information étayant une opinion.
Articles La branche route de la CFDT dérape (07/08/24) et La CFDT-Route attendue au tournant (11/09/24) :
- Les articles se contredisent lourdement… Notamment à cause de phrases à rallonge ou se liant les unes aux autres ;
- Le 07/08 : les SG de l'Union et de la Fédé roulent en Merco ; le 11/09 : seulement le SG et le SGA de l'Union ;
- Le 07/08 : les deux bolides ont été retournés au concessionnaire ; le 11/09 : seulement le coupé sport ;
- Le 07/08 : les SG de l'Union et de la Fédé créent Pendragon ; le 11/09 : le SG et le SGA de l'Union créent Pendragon (c'est faux) ;
- Le 07/08 : cession des parts en octobre 2023 aux boss de l'Union et de la Fédé ainsi qu'à deux acolytes. Une première cession avait déjà eu lieu en septembre 2021 et lesdits acolytes ont signé les statuts de Pendragon dès avril 2021 (création). 11/09 : non, les deux acolytes cessionnaires ne sont pas tous deux de la Fédé, l'un est de l'Union ;
- Le 07/08 : l'essentiel des finances provient des fonds destinés au dialogue social et au paritarisme ; le 11/09 : cela provient de partenaires de la protection sociale et de la formation pro ;
- Le 11/09 : « Après une grogne interne, comme l'a écrit le Palmipède, seul le coupé sport a été rendu ». C'est habile : le « comme l'a écrit le Palmipède » peut aussi bien porter sur la grogne interne, auquel cas c'est vrai, que sur la restitution, auquel cas c'est faux ;
- Conclusion : vous avez vraiment merdé.
Les ennuis de son camarade de Telegram mettent Macron sur la touche, sous-article Une procédure judiciaire sur mesure du 04/09/24 :
- La loi SREN (2024-449) ne prévoit pas de complicité avec les pédocriminels, mais des poursuites pénales pour les hébergeurs Internet et les fournisseurs de services Internet qui ne retirent pas les contenus terroristes ou pédopornos après avoir été informés de leur existence. C'est le prolongement de la responsabilité des intermédiaires techniques. La complicité semble être une invention de la presse, dont le Canard.
Un découpage électoral à surprises du 14/08/24 :
- Il aurait été appréciable de recueillir l'expertise d'un juriste sur la décision 2008-573 DC évoquée. Si, comme en fait mention votre article, elle rappelle la primauté d'une répartition démographique, elle s'oppose surtout à l'ajout de l'évolution de la démographie et du nombre d'inscrits sur les listes électorales comme critères d'intérêt général appliquables au cas par cas. C'est surtout ce deuxième point, le cas par cas, qui me semble avoir été retoqué, au motif qu'il permet le tripatouillage électoral.
Plouf dans les mégabassines du 24/07/24 :
- Vous ne relatez pas que le décret 2024-423 concerne aussi les contentieux portant sur le nombre de bêtes d'un élevage, ni que le juge devra statuer sous dix mois, ni qu'il n'y aura plus d'appel (seulement première instance et cassation). Ça me paraît pourtant être des éléments clés du décret.
L'ISF à la mode NFP, c'est pas pour demain du 10/07/24 :
- Là encore, l'expertise d'un juriste sur la décision 2012-662 DC du Conseil constitutionnel, notamment au regard de la clause anti-abus de droit prévue par la loi de finances pour 2017 et validée sous réserves dans la décision 2016-744 DC mais jamais appliquée (ISF remplacé par IFI et apparition du PFU). De plus, il me semble que le Conseil retoque surtout la temporalité de la perception, car la loi de finances pour 2013 prévoyait de taxer les bénéfices non-distribués (premier problème) dont le contribuable avait pris le contrôle dans les 5 dernières années (deuxième problème). Bref, votre article est assez peu solide pour établir que l'ISF à la mode NFP n'est pas pour demain ;
- L'expertise d'un juriste aurait été tout autant utile lors de votre questionnement incessant sur l'éligibilité de Mariani aux élections régionales de 2021 en relation avec sa domiciliation avignonnaise. Cela vous aurait évité, après un premier article axé sur le droit mais inexact, d'être contraint de vous replier sur la morale dans un deuxième article, et de ne pas rapporter, par suite, la décision du Conseil d'État (cf. mon email du 18/01/22).
Trop mortelle, la fiscalité ! du 29/05/24 :
- L'INSEE n'écrit pas que « seuls 13 % des Français ont de quoi léguer plus de 100 000 euros », comme vous le faites. Elle écrit que 13 % des héritages sont supérieurs à 100 k€, étant entendu qu'il peut y avoir plusieurs héritiers pour une même personne. Comme la richesse est concentrée, les 13 % des héritages > 100 k€ doivent concerner une même descendance, donc pas 13 % des Français.
Explication de plainte du 27/03/24 :
- Sur le plan technique, cet article est imbitable, notamment ses 1er et 5e paragraphes. Confusion intranet / réseau. Pour se connecter à votre intranet sans être dans vos locaux, s'il est bien conçu, il faut un accès Wi-Fi… pas protégé (comme il se doit, c'est-à-dire WPA 2 d'entreprise, pas WPA 2 PSK, par ex.). Pour remonter d'un intranet aux boîtes emails des journalistes ou à leurs ordinateurs, il faut un réseau d'entreprise très mal fichu et très mal sécurisé (et très dangereux, même sans policier dans l'équation) ainsi qu'une opération de police plus chiadée ;
- Au sujet de l'emploi fictif présumé, il est extrêmement dommage que le Canard ait pris la parole plusieurs fois en Une sans la donner à son contradicteur.
EDF livre ses centrales nucléaires à Amazon du 14/02/24 :
- Utilisation du mot « IA » au lieu d'évoquer un traitement statistique sur la durée de vie des pièces, dans le probable but d'effrayer votre lectorat ;
- S'inquiéter du renseignement états-unien est infondé : 1) si un tel service n'a pas une vision minimale des centrales de ses chers alliés, c'est qu'il est vraiment très mauvais ; 2) comme vous aimez le rappeler, nos réacteurs sont basés sur un modèle Westinghouse modifié, c'est-à-dire une entité états-unienne ; 3) en 2022, EDF, en manque de personnel, a fait appel à des soudeurs états-uniens de chez Westinghouse… ;
- Le lien entre la décision d'EDF et le Data Act européen est tiré par les cheveux ;
- Évidemment qu'un traitement et un stockage par un acteur français aurait été mieux, mais ce n'est pas votre angle d'attaque qui consiste juste à jouer sur nucléaire + numérique + espionnage = catastrophe nucléaire pour, probablement, effrayer vos lecteurs.
Open data, attention à l'excès de transparence du 22/11/23 :
- L'article est plutôt creux… Au lieu de moquer le patron de Pappers (surtout le dernier paragraphe et le dessin de presse…), vous auriez pu regarder du côté du L123-52 du Code du commerce (et donc voir que ce n'est pas Pappers qui publie initialement en Open Data gratos et ainsi exposer qu'il ne fait que propager plus loin des éléments récupérables via un téléservice de l'INPI). Vous auriez pu remarquer que cet article de loi comporte une contradiction entre une liste limitée de données à caractère personnel (DCP) publiables d'un côté et une publication des « pièces annexées » qui contiennent beaucoup plus de DCP. Il est là le vrai sujet. Vous auriez pu mieux interroger la CNIL et apprendre que, saisie par de nombreuses personnes, elle étudie le sujet. Vous auriez pu interroger la pertinence de la réponse du gouvernement à la question du député Sorre (l'opposition et la suppression sont impossibles en cas d'obligation légale, ce qui est le cas ici). Si les fichiers PDF mis à disposition par Pappers sont indexés par les moteurs de recherche dont Google, ils ne sont pas analysables par un programme informatique sans traitement préalable (et l'on ne peut pas chercher un mot dedans avec une visionneuse PDF). Etc.
- Souriez, l'intelligence artificielle vous trouve suspects ! du 01/11/23 :
- Confusion entre des surveillances de l'espace public (ou accessible au public) et privé comme la surveillance des conducteurs visant à prévenir la somnolence. Ce n'est quand même pas la même chose. D'autres confusions seraient à critiquer. L'usage même du mot « intelligence artificielle » aussi.
Je m'arrête là.
Il est de notoriété publique que le Canard traite mal, probablement par ignorance, les problématiques liées au numérique (les articles sur les câbles sous-marins d'Internet des 05/10/22, 09/03/22, ou 07/04/21, ou ceux sur l'équipementier chinois Huawei [1, 2, 3], ou ceux sur le réseau social TikTok [j'en ai pointé aucun sur mon shaarli, mais j'en donne un aperçu ici], ou ceux sur le risque d'attaques informatiques visant les JOP 2024 [j'en ai pointé aucun depuis mon shaarli], ou ceux utilisant hors contexte le terme IA [aperçu ici), ou ceux sur les responsabilités juridiques des acteurs d'Internet [j'en ai pointé aucun depuis mon shaarli] ‒ cf. mon email du 04/11/2018, vous n'avez pas progressé depuis ‒ et j'en passe, sont exaspérants d'inexactitudes et/ou d'absence de mise en perspective et/ou de pédagogie) et au nucléaire (voir, par ex., mon email du 16/08/23 [voir ci-dessous]). Je ne parle pas de publier une opinion en sus de faits, mais bien de l'inexactitude et/ou de l'incomplétude des faits présentés, ce qui invalide toute l'opinion exposée. Le numérique figurant dans des pans entiers de nos vies, ne pas le comprendre ni n'être en mesure de le vulgariser est problématique et vous coupe d'un lectorat jeune. Vous ne pourriez pas faire relire vos articles par des personnes compétentes en la matière ?
Enfin, le Canard devrait citer précisément ses sources. Il est extrêmement pénible de retrouver soi-même une décision du Conseil constitutionnel, un rapport parlementaire, une décision de justice, etc. Indiquer la référence précise du document ne vous coûterait rien… On pourrait même imaginer des liens depuis votre site web (merci alors de prendre en compte vos lecteurs au numéro au format papier).
Bonne fin de semaine.
Mon email du 16/08/2022 à propos des assurances pour le nucléaire civil évoquées dans un article du 13 juillet 2022 :
Bonjour le Canard,
Je m'interroge sur l'article Un "cocktail de risques", dit-il de Jean-Luc Porquet publié dans le Canard du 13 juillet 2022.
Il y est dit que les centrales nucléaires sont assurées par les États et non par des assurances privées, car le prix de tels contrats ferait exploser le coût de revient de la production électrique nucléaire.
Or, l'article L597-7 du Code de l'environnement dispose qu'un opérateur nucléaire doit souscrire une assurance ou disposer de garanties financières. Le L597-4 du même Code fixe le montant de la responsabilité civile à 700 millions d'euros, en application de la convention de Paris sur le nucléaire.
Il existe des assurances privées et des fonds de garantie spécialisés dans le nucléaire comme Elini ou Assuratome.
J'entends l'évaluation du risque par l'IRSN citée dans l'article, mais, d'un autre côté, l'ASN et RTE l'estiment à 450 milliards d'euros, fourchette haute.
Un article plus fouillé et nuancé aurait été le bienvenu pour les ignorants du secteur comme moi. Car, si l'on reprend l'article tel quel dans une conversation, on se fait démonter par tout gus qui a étudié un peu le sujet, ce qui est dommage.
Ce qui serait intéressant de savoir (j'ai rien trouvé) :
- EDF est-il assuré ou a-t-il constitué des garanties financières (auquel cas, on pourra affirmer que c'est l'État français qui assure le risque à 100 %) ?
- Qui sont les assureurs privés des centrales françaises (Elini, Allianz et Assuratome, a priori) ?
- Les capacités de ses assureurs privés correspondent-elles à leur engagement ? La capacité d'Assuratome serait de 200 millions d'euros d'après la Revue Banque… ;
- Pourquoi les États ont signé la convention de Paris sur le nucléaire qui les oblige à assurer la majorité du risque ? Quels ont été les enjeux, la géostratégie et les biais ?
Bonne journée.
Depuis mon email de novembre 2024, le Canard enchaîné a publié de nouveaux articles foireux :
Bonjour le Canard,
Réactions à l'article Amazon refuse de livrer son cloud à EDF (édition du 24/12/2024) :
- La localisation effective des données (en France, aux États-Unis, etc.) hébergées par une entité états-unienne ne fait pas obstacle à leur récupération par les autorités états-uniennes, cf. le CLOUD Act [voir] (qui a été adopté alors que la Cour Suprême allait trancher le cas d'une réquisition d'emails hébergés en Irlande par Microsoft [lire ici]) ;
- En France, Amazon dispose d'une « région », c'est-à-dire de plusieurs centres de données (datacenters). Le tout-venant pour y souscrire (cf. https://aws.amazon.com/fr/local/france/paris/). Ainsi, la baisse de rentabilité dans le cas d'un hébergement en France ne tient pas. Sauf si EDF a commandé des services supplémentaires spéciaux (tous ne sont pas disponibles dans toutes les régions, peu importe le client) ou a posé des exigences supplémentaires à la simple localisation en France ;
- Vous rapportez les propos d'un haut fonctionnaire pour qui « Amazon refuse tout simplement d'écrire noir sur blanc qu'il ne fournira pas les données de ses clients français aux services de renseignement américains ». C'est parfaitement exact, connu, et documenté. Et donc ? Il n'y a rien à tirer d'une telle déclaration. La loi états-unienne dispose que les entités états-uniennes doivent collaborer avec le renseignement et la justice états-unienne. Dès lors, une telle clause dans un contrat n'aurait aucune valeur juridique (loi > contrat). Imaginez une société commerciale française qui écrirait, dans ses contrats avec des entités étrangères, ne pas respecter la législation française… ;
- Au final, votre article est creux, le lecteur ne sait pas ce qui a réellement bloqué le deal EDF/Amazon.
Bonne journée.
Je passe sur tous les articles vides, qui ne contiennent pas vraiment d'informations…